Aude, magistrate

Interview

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"Un magistrat doit rester curieux car on travaille au contact de l’humain. Il faut avoir un intérêt réel pour le quotidien des gens et les réalités auxquelles ils sont confrontés."

Aude est actuellement vice-procureure au tribunal judiciaire de Paris, chargée des politiques partenariales. Après plus de 15 ans comme magistrate du parquet dans plusieurs juridictions, sa vocation est intacte. Ce qu’elle apprécie le plus dans cette fonction ? Le contact avec les justiciables. Elle raconte son parcours, les atouts de son métier et le plaisir de l’exercer.

Quel est votre parcours et comment êtes-vous devenue magistrate ?

J’ai suivi un cursus universitaire classique en faculté de droit, puis je me suis inscrite en thèse de philosophie et d’histoire du droit pénal avant de passer le concours de la magistrature. J’ai intégré l’École nationale de la magistrature en 2005. J’ai voulu devenir magistrate pour contribuer à l’intérêt général et tenter d’obtenir, au terme de chaque procès pénal, un apaisement social.
J’ai eu un parcours essentiellement réservé au parquet dans les fonctions de substitut et de vice-procureur, d’abord à Créteil puis à Paris. Je suis actuellement chargée des politiques partenariales de la procureure de la République de Paris. Il s’agit de favoriser les liens avec l’ensemble des acteurs institutionnels (collectivité territoriale par exemple) et de la société civile (associations…) pour rendre la politique pénale de la procureure plus efficace.

C’est en développant son action « hors les murs » avec un réseau de partenaires que la Justice peut répondre au mieux aux besoins des justiciables, améliorer leur accès au droit, élargir le panel des mesures alternatives aux poursuites pour les auteurs d’infractions. Par exemple, je travaille à améliorer l’accompagnement des victimes de violences conjugales et des personnes vulnérables. Il existe donc une grande diversité de métiers au sein de la magistrature en dehors de la fonction de juger.

Qu’est-ce qui vous intéresse le plus dans votre activité professionnelle ?

L’enfance et l’adolescence sont des sujets qui m’intéressent et j’ai eu beaucoup de plaisir à travailler au sein du parquet des mineurs qui doit se préoccuper de la protection de l’enfance autant que de la délinquance juvénile. J’ai eu de grandes satisfactions aussi à me spécialiser en droit de la presse et à prendre part aux premières années de fonctionnement du pôle national de lutte contre la haine en ligne.
Je crois que pour bien faire, le magistrat doit savoir s’ouvrir à l’ensemble des sciences humaines et s’intéresser à d’autres disciplines telles que l’histoire, la sociologie, la médecine, la psychologie. Un magistrat doit rester curieux car on travaille au contact de l’humain. Il faut avoir aussi un intérêt réel pour le quotidien des gens et les réalités auxquelles ils sont confrontés. On peut faire face à des situations douloureuses, notamment en matière pénale.

Une autre source de satisfaction, c’est qu’on voit les suites de son travail : on est nous-mêmes auteurs de la réponse à un problème soumis. Voici un exemple : je suis appelée car tel individu est en garde à vue pour tels faits ; je dirige l’enquête en tant que procureur en demandant telles investigations ; je décide soit de classer sans suite, soit de poursuivre devant le tribunal ; je peux ensuite être présente à l’audience, demander une peine et je saurai ce que le tribunal aura décidé. On est là du début à la fin d’une procédure judiciaire.

Quels sont les avantages du métier de magistrat ? 

D’abord, c’est un métier à responsabilité qui implique d’aimer prendre des décisions qui soient équilibrées et objectives. Le métier de magistrat satisfait les tempéraments qui aiment décider.
Il faut ensuite aimer écouter et ne pas craindre la contradiction. S’affranchir de ses certitudes, car la réalité est souvent beaucoup plus riche et surprenante.
Enfin, l’un des avantages du métier de magistrat est l’unicité du corps. Un magistrat du parquet peut devenir magistrat du siège (juge aux affaires familiales, président de tribunal correctionnel) en cours de carrière et vice-versa. Dans sa vie professionnelle, on peut embrasser des missions très différentes sans risquer la monotonie ni l’ennui. Peut-être qu’un jour je souhaiterai exercer au siège !

Quels conseils pourriez-vous donner à un candidat au concours ? 

Au moment des épreuves, il faut savoir s’arrêter quelques jours et se reposer, comme avant un marathon. Ce n’est pas le bachotage qui fonctionne, ce concours est la démonstration de votre capacité de réflexion. Il n’y a pas de réponse unique, le droit n’est pas une matière scientifique. Il faut savoir tenir une démonstration et convaincre en usant d’arguments équilibrés qui s’inscrivent dans le cadre de la loi.
Aux épreuves écrites, il faut garder à l’esprit que les correcteurs et membres du jury sont des magistrats en fonction qui souhaitent trouver des personnes qui s’intègreront bien dans la magistrature. Pour les épreuves orales, il faut montrer qu’on est une personne avec qui le dialogue est possible. Ensuite, il ne faut pas se décourager. Même si la réussite du concours n’a pas lieu du premier ou du deuxième coup : ne renoncez pas trop vite, surtout si c’est une vocation !
Un dernier conseil, il ne faut pas hésiter à aller suivre une audience correctionnelle, qui est accessible au public. Quand on va à l’audience, on comprend mieux les enjeux et on s’enrichit de ce qu’est la vie judiciaire au quotidien.

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